L'urucum (Roucou en français, Bixa orellana) est une plante touffue originaire du Brésil, connue des peuples indigènes autochtones depuis des millénaires.
Le mot urucum vient de la langue tupi-guarani translittéré « uru-ku » et signifie « rouge ».
Son utilité dans la culture indigène est présente dans la peinture corporelle, l'art et la cuisine.
Cette plante produit des fruits sous forme de grappes de poilus qui ressemblent à des épines, avec de petites graines rouges à l'intérieur. Et c'est à partir de ces graines rouges que, lorsqu'elles sont broyées et frottées dans l'eau, une couleur rougeâtre se forme.
Chacun des plus de 300 groupes ethniques répartis sur le territoire brésilien a son propre mode d'expression, traduit, entre autres aspects, par des peintures corporelles indigènes réalisées avec de la peinture à base de l'urucum. Le fruit, dont la coloration représente un élément important de la symbologie et du système de communication visuelle, est présent dans la culture de plusieurs communautés à travers le Brésil.
Les indigènes peignent leur corps avec de l'urucum, symbolisant la couleur du "Père Soleil", une étoile qui rayonne de l'énergie vers la terre, où la vie n'existerait pas sans sa chaleur. Le ton rougeâtre le plus intense est la couleur du Soleil Central de la Galaxie, différent du ton jaunâtre du soleil qui illumine le ciel de la planète Terre.
Les peuples autochtones des deux sexes et d'âges différents utilisent la teinture pour faire des dessins sur le corps ou l'étaler sur la peau afin de composer la base sur laquelle des contours seront réalisés avec des encres d'autres couleurs, comme le génipap, qui est noir. L'urucum est également utilisé pour la finition d'objets traditionnels, tels que des pointes de flèches et des paniers.
Ses feuilles ont de nombreuses propriétés médicinales, notamment pour guérir les maladies.
Certaines références indiquent que les Aztèques utilisaient des pigments d'urucum pour donner la consistance et l'apparence du sang à une boisson préparée à partir de cacao. Cette boisson était ensuite utilisée dans leurs rituels, simulant le sang humain. Les indigènes sud-américains utilisaient des huiles, des résines, des cires et des graisses extraites de plantes ou d'animaux pour préparer des teintures de rocou.
Actuellement, le Brésil est le plus grand producteur mondial de graines d'urucum.
Comme dans cette résidence de recherche et création à UAP - Usina da Alegria Planetária (lieu d'art et de culte du candomblé), la question était de rencontrer les Orixás, entités syncrétiques issues du métissage de la culture indigène et de l'esclavage noir , il s'agissait ainsi le percevoir l'invisible.
Cette perception demande un état modifié de conscience à travers le contact avec la nature. Cet état de contemplation a été nécessaire pour "ne pas agir", pour plutôt "les recevoir", "se laisser agir", "être agi" par ces influences et existences autres.
C'est ainsi que l'Urucum m'a choisit, qu'il s'est présenté à moi, et non le contraire, comme dans l'optique naturaliste et anthropocentrique, où c'est l'homme qui a choisi et qui agit sur la nature.
Tout le temps de cette résidence a été ainsi destiné à entrer en connexion avec la plante, la préparer selon la tradition, faire sa connaissance, entrer en contact avec sa couleur, ses symboles, ses influences sur moi, ainsi qu'avec l'Orixá représenté par sa couleur rouge: Ogum.
Entité forte et guerrière, Ogum est lié à toutes les difficultés et batailles auxquelles on est confronté au cours de la vie. Protecteur des individus qui sont, en quelque sorte, persécutés, cet Orixá cherche toujours à garantir l'harmonie de la loi et de l'ordre.
Précisément à cause de son caractère fort, guerrier et passionnel, il a été associé à la couleur rouge.
Néanmoins, les Orixás n'ont pas de couleur, car ils fonctionnent avec tout le spectre lumineux. C'est nous, les humains, qui définissons une couleur pour les Orixás, par commodité ou de manière symbolique, pour atteindre un certain objectif.
C'est ainsi que, pendant la performance avec Bukuritós Aruanda, plasticien et chaman, le rouge de l'urucum était une étape, un passage, une préparation pour l'arrivée d'autres couleurs, d'autres entités, d'autres êtres invisibles - car, tout comme les orixás et les indigènes amérindiens, nous n'avons pas une seule identité, nous sommes plusieurs. Mais pour cela, il faudra fermer encore une fois l'oeil extérieur pour ouvrir celui de l'intérieur, du coeur.
Une performance de Biño Sauitzvy.
Collaboration artististique: Bukuritós Aruanda.
Performers: Biño Sauitzvy et Bukuritós Aruanda.
Photos: Kabila Aruanda, Bukuritós Aruanda et Biño Sauitzvy.
Résidence à UAP - Usina da Alegria Planetária dans le cadre de Résidences sur Mesure de l'Institut Français avec le projet «L’étude des pratiques animistes brésiliennes pour la création de performances des arts de la rue».
São Paulo, Brésil, 2021.
Texte: Biño Sauitzvy (Robinson Sawitzki)
https://www.institutfrancais.com/fr/magazine/zoom/artiste-bino-sauitzvy-en-residence-au-bresil